Le go est né en Chine il y a longtemps avant Jésus Christ... Heu, pour être plus précis, ça fait 4000 ans que les goban existent. La légende veut que ce soit l'empereur Yao qui les ai inventés en même temps que les règles fondamentales du jeu de go, désireux qu'il était de donner à son fils une instruction philosophique efficace et intéressante (car chacun sait à quel point le rôle de la philosophie est important dans l'éducation d'un jeune bambin de 6 ans). D'ailleurs, Confucius lui-même reconnaît dans ses écrits que la pratique du go est préférable à l'oisiveté ! Alors bon, si ça vous suffit pas… Les japonais ont bien compris l'intérêt de ce jeu, eux. Après avoir connu son apogée chinoise durant la période courant du IIème au Vème siècle après JC, le go s'exile au Japon (avec le bouddhisme) aux alentours du VIIème siècle. Il reste néammoins populaire en Chine, jusqu'à l'instauration du régime communiste qui désapprouve alors l'infâme outil du capitalisme triomphant et impérialiste que constitue incontestablement le go. Heureusement, depuis 1978, les dirigeants de la République Populaire semblent avoir révisé leur jugement : le go chinois fait un come back retentissant, et désormais les pros de l'Empire du Milieu peuvent rivaliser sans peine avec les meilleurs japonais.
En parlant du Japon, revenons un peu en arrière, juste au moment de l'introduction du go dans la culture de ce pays… Grâce à un engouement particulier de la part des samouraïs, le go devient rapidement très populaire, dans l'aristocratie aussi bien que dans le petit peuple. Lorsqu'en 1602 est fondé le Shôgunat, le gouvernement soutient et encourage le go à travers les quatre principales familles de joueurs rivales qui s'appliquent à approfondir et à diversifier les techniques du jeu. De grandes compétitions annuelles sont organisées, les meilleurs joueurs de chaque famille disputant des parties échevelées devant un Shogun ravi par tant de maîtrise. Le terrible Nobunaga Oda était particulièrement friand de ces affrontements par pierres interposées. Cela devait le changer de ses innombrables et très réels massacres qui devenaient lassant, à la longue. Mais nous nous égarons… La famille Honïnbo était la plus prestigieuse, et comptait généralement dans ses bataillons d'accros au goban les meilleurs joueurs. Le dernier des Honïnbo fit d'ailleurs don de son nom pour qu'il serve de titre à un tournoi annuel. Comme quoi, les japonais peuvent se montrer généreux… Avec les réformes de l'ère Meiji débutées en 1868, le go n'est plus nationalement soutenu et connaît une période de déclin, qui prend heureusement fin au début des années 20 avec la fondation de la première ligue professionnelle de go, la Nihon Kiin. Et puis comme organiser des tournois n'est pas gratuit, divers sponsors commencent à distribuer leur argent avec largesse pour la bonne cause. Aujourd'hui, le go japonais est un immense business, administré par deux ligues professionnelles (la Nihon Kiin - oui bon, c'était pour être sûr que vous n'aviez pas oublié - et la Kansaï Kiin), soutenu par la presse et de grandes entreprises, rediffusé à la télévision et TRES lucratif pour les meilleurs pros, qui gagnent plusieurs centaines de milliers d'euros par an en prix.
En restant en Extrême Orient, on peut parler du cas extraordinaire de la Corée. Le développement du go coréen a été tardif, mais très spectaculaire. Les premières écoles professionelles (qui donneront les fameux Yongusaeng) apparaissent dans les années 80 et moins de 20 ans plus tard, 40% de la population sait jouer au go. Logique donc que ce soit la Corée qui domine les tournois internationaux actuels.
Mais qu'en est-il de l'Europe ? Eh bien, c'est à partir de la fin du XIXème siècle (avec 4000 ans de retard sur la Chine et 1300 ans sur le Japon) que le vieux continent voit arriver les premiers goban importés par des immigrés japonais. C'est ainsi que les joueurs d'échecs allemands Edward Lasker et Otto Korschelt s'initient au go, après avoir remarqué une rubrique de tsumego dans un journal nippon. Ce fut Korschelt qui publia en 1900 le premier traité de go occidental, offrant les règles fondamentales et diverses stratégies au grand public européen.
Le go a su préserver son mystère et toute sa profondeur malgré des milliers d'années de pratique. La première partie notée remonte au IIème siècle après JC, mais on continue encore et toujours à jouer, de manière de plus en plus évoluée, à tel point que le potentiel ludique du go semble presque infini...